Dans quelles circonstances les entreprises peuvent-elles exercer un pouvoir de marché ?
Cours de spécialité économie approfondie EA de terminale économique et sociale ES.
Stratégies d’entreprises et politique de la concurrence dans une économie globalisée.
Dans quelles circonstances les entreprises peuvent-elles exercer un pouvoir de marché ?
Objectifs :
→ Savoir expliquer la diversité des structures de marchés, notamment la concurrence pure et parfaite (atomicité, libre entrée et libre sortie, homogénéité des produits, transparence du marché, parfaite mobilité des facteurs de production), et les autres formes de concurrence.
→ Savoir expliquer que le pouvoir de marché permet aux entreprises d’élaborer des stratégies concurrentielles.
→ Savoir caractériser la nature et la variété des barrières à l’entrée qui explique l’existence d’un pouvoir de marché et sa persistance.
→ Savoir expliquer les stratégies de prix du monopole discriminant.
Notions à connaître :
Acquis de première : oligopole, monopole, pouvoir de marché, preneur de prix, coût moyen/marginal, recette moyenne/marginale.
A acquérir en terminale : modèle théorique, concurrence pure et parfaite, structure de marché, élasticité prix de la demande, faiseur de prix (« price maker »), différenciation des produits, marché contestable, économie d’échelle, barrière à l’entrée, prix prédateurs, capacité excédentaires, fusion acquisition, rente de monopole, monopole discriminant.
▲ Les notions en gras sont les notions qui apparaissent dans le programme, pour lesquelles vous serez évalués lors du baccalauréat. Les autres notions sont nécessaires pour bien maîtrisées les notions en gras.
Vous pouvez trouver ci-joint le dossier documentaire pour les élèves :
I] Les imperfections de la concurrence permettent aux entreprises d’avoir un pouvoir de marché.
A) Selon la structure de marché, les entreprises peuvent plus ou moins influencer le prix.
1. Le modèle de la concurrence pure et parfaite : les agents économiques sont « preneur de prix ».
Le but d'un modèle est de simplifier la réalité en n'en représentant qu'une partie pour mieux la comprendre. On ne représente donc pas tout la réalité dans un modèle, on fait des hypothèses. Par exemple en technologie quand on faisant des schémas, on ne représentait pas tout. Une carte routière est une représentation simplifié de la réalité. Un plan de métro (tracés des lignes, distances).
Les économistes se basent sur le modèle de la concurrence pure et parfaite : c’est une situation de concurrence où les agents économiques sont « preneurs de prix » (price taker) : ils n’ont pas de pouvoir de marché et ne peuvent pas influencer les prix. Le modèle de la concurrence parfaite repose sur cinq conditions :
- L'atomicité des acteurs : les offreurs et les demandeurs sont multiple et de petite taille. Ils ne disposent donc pas de pouvoir de marché, ne peuvent pas influencer les prix.
- L'homogénéité des produits : les produits sont de qualité identiques, ils sont tous similaire, ils sont donc parfaitement substituable (on peut remplacer un produit par un autre).
- La transparence de l'information : l'information de tous les acteurs est parfaite, immédiate et sans coûts.
- Libre entrée et sortie du marché : tout les acteurs peuvent entrer et sortir du marché, ce qui suppose qu'il n'y a pas de barrière.
- La libre circulation des facteurs de production (le capital et le travail) : ils sont parfaitement mobile et peuvent se déplacer d'une industrie à une autre.
▲ Attention, il ne faut pas seulement mémoriser l’appellation des cinq conditions (atomicité, homogénéité, etc.) mais ce que cela représente.
Lorsqu’une entreprise produit, elle a des coûts de production. Le coût moyen est le coût des production en moyenne par unité produite (rapport entre le coût total et la quantité produite). Le coût marginal est le coût de production de la dernière unité produite. Il est généralement différent du coût moyen du fait des coûts fixes qui sont les coûts indépendant des quantités produites. Pour cuire une pizza, il me faut un four. Plus je cuis des pizzas, plus le coût moyen va diminuer car le coût de l’achat du four est réparti sur l’ensemble des pizzas. La recette moyenne est le rapport entre la recette totale et la quantité vendue. La recette marginale est liée à la vente d’une unité supplémentaire du produit vendu. C’est donc le prix de vente (Rm=RM). En concurrence parfaite, le prix de vente est fixé sur le marché car les entreprises sont preneuses de prix.
La concurrence pure et parfaite n’est pas la structure de marché la plus avantageuse pour les producteurs car ils sont preneurs de prix. Il peut alors être intéressant d’acquérir un pourvoir de marché afin d’influencer le prix.
2. Les situations d’imperfection de la concurrence permettent aux entreprises de détenir un pouvoir de marché.
La structure de marché est la manière dont les marchés sont organisés. On se pose deux questions : les produits sont-ils différenciés ? Et Combien y a t-il de producteur ? On va voir qu'il existe plusieurs structures de marché.
On peut répertorier quatre grandes structures de marché : la concurrence pure et parfaite, le monopole, l’oligopole et la concurrence monopolistique. Le monopole est une situation de marché dans laquelle un vendeur unique est confronté à un grand nombre d'acheteurs (RATP pour le métro). L’oligopole c'est lorsqu'il y a une multitude d'acheteur et peu de vendeur (opérateurs téléphoniques, fournisseur d’internet, opérateur système pour les ordinateurs ou les smartphones etc.). La concurrence monopolistique c'est quand il y a beaucoup de producteurs en concurrence qui produisent des produits différenciés (voir "différenciation des produits), qui sont imparfaitement substituables (les smartphones, les chaussures de running). La concurrence est donc une notion relative (il y a plus ou moins de concurrence).
Le pouvoir de marché est la capacité d’une entreprise à influencer le prix du marché. Il dépend du nombre d’entreprises présentes sur le marché, de l’intensité de la concurrence qu’elles se livrent mais aussi de l’élasticité de la demande au prix. Le pouvoir de marché est donc une notion relative (il y a plus ou moins de pouvoir de marché). L’élasticité de la demande au prix mesure la sensibilité de la réaction de la demande pour un bien suite à la variation du prix de ce bien. [C'est le rapport entre le taux de variation de la demande du bien et le taux de variation de son prix. Si, par exemple, la demande d'un bien diminue de 6 % quand son prix augmente de 2 %, son élasticité-prix est de – 3]. Si l’élasticité de la demande est faible (faible variation de la demande par rapport au prix, par exemple l’eau), les entreprises ont un fort pouvoir de marché.
Selon le pouvoir de marché, les entreprises sont plus ou moins faiseuses de prix. Le fait d’être faiseur de prix (price maker) est la possibilité de pour une entreprise d’influencer à elle seule le prix sur le marché (ce qui permet d’augmenter les profits = fixer un prix de vente supérieur au coût marginal). Plus le nombre d’entreprise est fort, plus l’élasticité prix est forte, plus l’intensité de la concurrence est forte, moins elles peuvent fixer les prix.
B) Différencier ses produits permet un pouvoir de marché (concurrence monopolistique).
Les entreprises peuvent chercher à se démarquer des autres grâce à la différenciation des produits c’est à dire la modification des caractéristiques d'un produit par une entreprise pour le distinguer des concurrents. Cela peut être par leurs critères physiques (packaging d'un produit cosmétique, puissance d'une voiture, options d'un smartphone, divers coloris d'un appareil électroménager, etc.), mais également en agissant par leur publicité ou sur leurs conditions de vente (frais d'envoi offerts à partir d'un certain montant d'achats dans les e-boutiques). L‘hypothèse d’homogénéité des produits n’est alors plus respectée et en raison de cette différenciation des produits, le marché se retrouve en situation de concurrence monopolistique. Les entreprises disposent alors, dans une certaine mesure, d’un pouvoir de marché. C'est la concurrence monopolistique.
Nous avons vu les différentes formes de structure de marché. Dans une analyse plus dynamique, la concurrence sur un marché ne dépend pas uniquement du nombre d’agents économiques ni de la taille des entreprises mais aussi si le marché est contestable autrement dit si des concurrents potentiels peuvent entrer sur le marché. Un marché est dit contestable (Baumol, Panzar et Willig) si l’absence de barrière à l’entrée permet à tout moment à des concurrents de mettre en cause le pouvoir de marché. Les entreprises vont alors adopter des stratégies pour conserver leur pouvoir de marché.
II] Les entreprises mettent en place des stratégies pour conserver et renforcer leurs parts de marché.
A) Les différentes barrières à l’entrée permettent de limiter la concurrence.
Les barrière à l’entrée sont des obstacles rendant difficile ou impossible l’entrée sur un marché pour un nouvel intervenant. Elles ont pour objectif de limiter la concurrence.
1. Les barrières structurelles dépendent des conditions de production.
Les coûts fixes sont les coûts qui ne varient pas avec le nombre d’unité vendue. Mettre des rails pour faire passer un train avec un passager et des milliers de trains avec des milliers de passagers coûte le même prix. Cela suppose donc d’importants investissement de départs. C’est un monopole naturel car il y a des coûts fixe élevés : si une entreprise produit il y a des économies d'échelles : produire en grande quantité permet d'arriver au coût de production par unité le plus faible possible.
Il existe des barrières à l’entrée qui dépendent des conditions de productions : ce sont les barrières structurelles. Par exemple le monopole naturel, forme de monopole justifié par des conditions techniques (coûts fixes élevés) qui font que les entreprises concurrentes ne seraient pas rentables, le monopole légal, forme de monopole protégé par des règlements administratifs (production nucléaire par exemple), le monopole d'innovation, forme de monopole résultant de la fabrication de l'entreprise d'un nouveau produit : il s'agit d'un monopole temporaire car l'innovation est rapidement imitée par d'autres entreprises ou encore le fait de posséder des ressources rares (métaux rares, pétrole, gaz etc.).
2. Les barrières stratégiques permettent de limiter la concurrence en dissuadant les entrants potentiels.
Il existe différentes stratégies pour empêcher les concurrents d’entrer sur le marché : la différenciation des produits et l’innovation, les capacités excédentaires, les prix prédateurs, la concentration des entreprises.
Un brevet droit de propriété qui accorde à son titulaire le droit exclusif sur son invention pendant une période limitée. Le but est d’inciter à innover puisque le brevet confère un monopole temporaire (pouvoir de marché). Cependant, une multiplication des dépôts de brevets peut aussi avoir pour objectif de pouvoir ensuite réclamer des redevances aux entrants qui utiliseront les technologies brevetés ou pour les empêcher d’accéder à ces technologies. Les dépenses en R&D, ou en communication, si elles sont très importantes, peuvent être dissuasives pour de nouveaux entrants.
Un prix prédateur consiste à pratiquer un prix en dessous du coût de production pour éliminer le concurrent. En baissant les prix, l’entreprise dissuade l’entrée sur le marché de nouveaux concurrents. Plus le prix est bas est moins les perspectives de profit sont importantes donc moins d’entrées. Cette pratique de prix prédateurs est illégale, mais difficile à prouver devant les tribunaux.
La stratégie de capacité excédentaire consiste à installer plus d’équipements que nécessaire pour indiquer aux concurrents des coûts d’entrée importants et signaler sa détermination à entrer dans une compétition rude. De même, les investissements massifs dans la R & D ou la communication signalent aux entrants potentiels un coût d’entrée très important qu’ils ne seront pas en mesure de récupérer s’ils devaient finalement abandonner la production
Une entente est un accord ou une action concertée qui a pour objet ou peut avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché de produits ou de services déterminés. Les ententes sur les prix et les cartels sont aussi des moyens pour les entreprises de conserver leurs parts de marché et d’influencer les prix sur le marché. Ces stratégies sont cependant illégales.
Enfin, il existe la possibilité de réaliser des fusion acquisition, c’est-à-dire le rachat d’une entreprise par une autre, que ces deux entreprises soient similaires, complémentaires ou distinctes. Il s’agit pour les entreprises d’accroître par ce biais leurs parts de marché, leurs activités et leur profit en faisant des économies d’échelles et en réduisant le nombre de concurrent.
B) Le monopole discriminant permet de maximiser la rente du monopole.
Lorsqu’une entreprise est en situation de monopole, elle est faiseuse de prix (selon l’élasticité prix de la demande et du risque d’arrivée des concurrents). Le prix étant supérieur au prix que l’on obtiendrait en situation de concurrence parfaite, la situation permet de faire plus de profit qu’en concurrence parfaite c’est une rente de monopole. Cependant, le monopole peut ajuster ses prix en fonction des différents consommateurs afin d’obtenir davantage de profit.
Dans le cas de la vidéo ci-dessous, les entreprises établissent des profils moyens de consommateurs, aux revenus et préférences différentes, et fixent des prix permettant de maximiser à la fois le profit sur ce segment de la clientèle tout en répondant à leur demande spécifique.
Un Monopole discriminant est un monopole qui pratique la discrimination par les prix : il vend un bien homogène à des tarifs différents selon le segment de clientèle ou la quantité consommée. Cela permet de maximiser les profits mais suppose d’identifier les dispositions à payer des acheteurs.
En discriminant par les prix, l'entreprise peut attirer une clientèle accrue. Si les tarifs, par exemple dans le cas d'un trajet en TGV, proposés étaient les mêmes pour les actifs occupés et les étudiants, il est très probable que peu d’étudiants (au pouvoir d’achat plus faible) voyageraient en TGV. La hausse de la demande prévue par cette discrimination par les prix doit donc engendrer une augmentation du chiffre d’affaires et du bénéfice de la SNCF.
La discrimination des prix peut se faire à des degrés différents :
- Discrimination du premier degré (ou discrimination parfaite par les prix) : le vendeur fixe un prix différent pour chaque unité du bien de sorte que le prix de chaque unité est vendue au prix maximum qu’un consommateur est prêt à payer pour cette unité. Ne s’observe jamais totalement dans la réalité : le vendeur ne peut pas connaître parfaitement la disposition à payer de chaque acheteur.
Ex : cas du psychanalyste, prix des billets d’avion, des chambres d’hôtel.
- Discrimination du second degré (ou politique de prix non linéaire) : les prix diffèrent en fonction du nombre d’unités achetées, mais pas d’un consommateur à l’autre.
Ex : communications teléphonique hors forfait (prix augmente), « 3 achetés = 1 offert ».
- Discrimination du troisième degré (ou politique de réductions tarifaires) : des acheteurs différents payent des prix différents, mais chaque acheteur paye le même prix pour chaque unité qu’il achète.
Ex : vente dans des pays différents, carte de réduction pour les jeunes à la SNCF.
Attention, il n’y a pas que les monopoles qui discriminent par les prix : cela se fait aussi en situation d’oligopole et de concurrence monopolistique, c’est-à-dire dès qu’il y a une possibilité d’influencer les prix. Par exemple les réductions étudiantes au fast-food, musée ou au cinéma, afin d’attirer une clientèle sensible au prix.